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La petite histoire de L'Islet
par Guylaine Hudon le 2022-01-19

Charles Koenig, capitaine au long-cours

Capitaine Charles Koenig. Photo : Nos origines.ca.


C’est ce qu’on peut lire sur sa pierre tombale qui s’incline toujours un peu plus vers le fleuve, signifiant presqu’un appel vers le grand large pour ce globe-trotteur. Ce cousin du capitaine J-Elzéar Bernier puise ses racines dans notre belle paroisse depuis quelques générations déjà. Il était l’arrière-petit fils du Baron Edmond Von Koenig qui fût sûrement un des premiers instituteurs à L’Islet, en tout cas le pre-mier pour la solde de l’Institution royale vers 1810. Si vous vous rappelez, j’avais raconté l’histoire des Koenig à L’Islet en trois volets dans les éditions de ce journal, du mois de décembre 2019, de février 2020 et de mars 2020.

Les échos de la version Internet du journal Le Hublot et de la page Facebook « La petite histoire de L’Islet » auront souvent apporté de l’eau au moulin, beaucoup d’agréables surprises et parfois même de véritables trésors, comme celui que je m’apprête à vous partager : Il s’agit de l’autobiographie dactylographiée que ce grand marin aura peut-être dicté (car il dut abandonner sa carrière de marin à cause d’une paralysie de son côté droit) ainsi qu’une photo d’une paire de jumelles qui lui fut remise en 1895 par le gouvernement  de Suède et Norvège pour services rendus. Ces jumelles appartiennent maintenant aux arrières-arrières-petits-enfants du capitaine Charles Koenig, ceux qui m’ont si généreusement transmis ces documents. Je profite de l’occasion pour les remercier une fois de plus.

Alors voici comment Charles Koenig résume sa généalogie et sa carrière :

Biographie du capitaine Charles Konig

(Notez que je transcris intégralement, l’absence du « e » dans Koenig est un mystère)

Le baron Edmond Von Konig, arrivé au Canada le 1er juin 1776 était lieutenant dans le régiment de Son Altesse le Prince Frédérick de Brunswick, venu pour aider à rétablir la paix entre Sa Majesté Britannique et les États-Unis d’Amérique. Le Baron obtint son congé et la permission de rester au Canada. Il épousa mademoiselle Louise Jean, Il est décédé à L’Islet le 19 juillet 1933 en laissant quatre enfants vivants : Nicolas-Frédérick, Georges-Olivier, Marie-Julie mariée à Jacob Gagnon, Marie-Anne mariée à John Simpson. Frédérick était mon grand-père, il est décédé le 10 décembre 1861 à l’âge de 75 ans. Mon père  Charles Frédérick Konig, pilote, épousa  le 9 décembre 1847 à l’âge de 28 ans, mademoiselle Sophie Lemieux âgée de 19 ans et décédée à l’âge de 76 ans, à L’Islet en 1903. Mon père est décédé à L’Islet à l’âge de 51 ans (1870). J’étais à la Havane (Cuba) lorsque j’ai appris son décès.

J’ai commencé mon service de marin à l’âge de quinze ans dans les bâtiments suivants :

- Août 1863 à novembre 1863 comme cuisinier à 4 $ par mois sur la goélette BELVINA.

- Saison 1864, cuisinier et matelot sur la goélette SARAH, à 8 $ par mois.

- 18 mai 1865 à août 1865 matelot sur le QUEEN VICTORIA, vapeur.

- Août 1866 à juin 1867, sur le briguantin B.L. GEORG.

- Juin 1867 à septembre 1867, matelot sur le vapeur NAPOLÉON III.

- Septembre 1867 à juillet 1868, matelot sur la barque AUGUSTINA.

- De septembre 1868 à mai 1869, se-cond sur le brigantin B.L.GEORG.

- De juin 1869 à juin 1870, second sur la barque BARBADOS.

- De septembre 1870 à novembre 1871, second sur le brigantin WASP.

- Marié à Caroline Fortin le 15 novembre 1871.

- Embarqué sur le brigantin SIX-FRÈRES comme capitaine à l’âge de 23 ans.

- En décembre de la même 1871 Caroline est venue me rejoindre à Halifax et nous sommes allés à Barbados, à notre retour à New-York, elle retourne à L’Islet.

- Arrivé à Québec avec le SIX-FRÈRES le 5 novembre 1872.

- Le 18 mars 1873, passé mon examen de capitaine au long-cours.

- De 1873 à 1881, capitaine et propriétaire du brigantin CORINNE.

- De septembre 1882 à avril1883, commandant du vapeur VALETTA.

- Janvier 1884, traversé à Cardiff, Angleterre pour rejoindre le navire SARMATION (full rig), fait un voyage aux Iles Philippines et revenu à New-York.

- Le 20 octobre 1885, parti de Philadelphie pour Sangai (Chine) avec ma femme et trois enfants : Johnny, Marie-Anna et Léopold. De Shangai à Portland (Orégon), sur l’océan Pacifique, le 20 octobre 1886 à 1 120 miles de la terre du Japon qui était la plus proche, est né François-Xavier-Pacifique, baptisé à Astoria (Orégon). Ma femme Caroline Fortin est décédée à Astoria (Orégon) le 29 janvier 1887 à l’âge de 35 ans, elle laissait vivants trois filles et quatre garçons : Léonce, Eugénie (en religion, sœur Ste-Camille de Leslis, Augustine à l’Hôtel-Dieu de Québec), Marie-Louise, Marie-Anna et Pacifique.

- Étant parti de Philadelphie à Shangai (Chine), de là à Portland (Orégon) puis de Victoria (B.C.) par chemin de fer à Québec, en arrivant à L’Islet ce voyage effectué avec le SALMATION complétait le tour du monde.

- Le 15 juin 1889, épousé mademoiselle Léda Fortin.

- Du 4 juillet 1888 à 1889, capitaine et propriétaire du Lanhershire, passé cette année à Sheraton et Mobile État de Penscola. (aujourd’hui Alabama).

- 27 juin 1891, appointé capitaine du vapeur ALERT dans le gouvernement, employé dans le service des phares et des bouées à 800 $ par année.

- 1895, une lunette m’a été remise par le gouvernement de Suède et Norvège en récompense de services rendus à la barque Norvégienne ARVILLA en détresse à L’Ile Rouge.

- Juillet 1902, envoyé à Paisly (Écosse) pour l’achèvement de construction du vapeur Druid. Ses plans de construction avaient été préparés d’après mes instructions. J’ai traversé le DRUID au Canada, arrivée le 8 août 1902.

- En 1904, envoyé en Écosse pour le MONTCALM, j’avais ma femme avec moi dans ce voyage. Nous avons  visité l’Angleterre, la France et la Belgique. Arrivé à Québec sur le MONTCALM le 3 décembre de la même année.

- Hiver 1904, travaillé à empêcher la glace de prendre dans le « sceau » avant la ville de Québec et entre Lévis.

- En 1905, envoyé à Barrow Unfurness pour surveiller le fini du vapeur LADY GRAY. J’avais ma femme avec moi ainsi que Charles-Henri. Ce bateau a été bâti par Vickers &Son, je l’ai traversé au Canada. Arrivé à Québec, le 23 octobre 1905.

- Laissé le département de la marine en 1908.

- 1909, entrepris de déblayer la partie sud du pont de Québec qui était tombé.

-     1910, embarqué sur le vapeur     SAGUENAY et voyagé de Montréal à Saguenay.

-     1913, laissé le SAGUENAY.

-     1914, tombé malade paralysé du côté droit, et depuis ce temps je n’ai rien fait.

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Je dois absolument faire un erratum au sujet de Caroline Fortin décédée à Astoria Or. J’avais à tort mentionné qu’elle était décédée suite à son premier accouchement alors qu’en réalité elle avait déjà eu 3 filles et 3 garçons.

Un Baron s’installe à L’Islet…

oui mais où?

Après avoir fait toutes mes recherches au sujet des Koenig, j’aurais bien voulu savoir où résidait le Baron Edmond Von Koenig à L’Islet. Eh bien!, au delà de toutes attentes, j’ai été contacté par courriel par M. Simon Adam, résident des Trois-Saumons, qui avait la réponse à ma question : Sur sa propriété! au 565, chemin des Pionniers Est! Et il a en main tous les documents le prouvant. En faisant ses recherches, M. Adam (pilote du St-Laurent à la retraite) a aussi découvert que le Baron fut brièvement propriétaire d’une autre maison qui, quelques années plus tard, soit à l’été 1829, a été le théâtre du meurtre sordide d’un jeune colporteur par François Marois, tueur en série et prédateur sexuel, alias le « docteur L’Indienne », à quelques voisins à l’est de là. Malgré quelques travaux d’excavation sur son terrain, M. Adam, n’a pas trouvé de tra-ces de fondations d’une ancienne maison. Par contre le choix de cet emplacement pour quelqu’un de peu fortuné est tout à fait logique; ces petites parcelles de terrain enclavées entre le chemin du Roi et le fleuve étaient vendues bon marché par les propriétaires terriens de cette époque. Ils  accordaient peu de valeur à des terrains ne pouvant être cultivés ou n’étant pas assez vastes pour y construire des bâtiments de ferme.


Acte de vente du terrain et bâtiments de Louis Fortin à  Edmond Victor Von Koenig en 1810. Photo : Fonds S. Adam.


Pour ce qu’il en est de la demeure du capitaine Charles Koenig, elle existe toujours et se situe au 390, chemin des Pionniers Est, juste en face du monument de la tempérance. En fait, elle fut la propriété de son père Charles-Frédérick de 1859 à 1887 avant d’y habiter avec Caroline Fortin, ensuite avec Léda (petite sœur de cette dernière) de 1887 à 1918, elle fut par la suite occupée par Charles-Bénoni Caouette et Délima Koenig de 1918 à 1922 et finalement par Pacifique et sa femme Corona Ménard de 1922 à 1929.



Maison qui a été la propriété des Koenig de 1859 à 1929,  située au 390, chemin des Pionniers Est. Photo J.P.


Le capitaine Charles Koenig mourut à son domicile de la rue D’Artigny dans le Vieux Québec la nuit du 13 octobre 1928.

Combien de surprises nous réserves-tu encore ma chère paroisse de Notre-Dame de Bonsecours?

Jérôme Pelletier

Sources :

- Fonds Pouliot

- Le village de nos ancêtres par Angèle Gagnon

- Le docteur L’Indienne par Michel A. Noreau