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Au temps du confinement pendant une pandémie à L'Islet... suite
par Guylaine Hudon le 2020-06-09

Je revenais du bureau de poste en lisant un dépliant sur la DPJ... soudain j'entends une voix qui me crie : salut. Je tourne la tête, un jeune garçon avec un casque de vélo sur la tête qui d'un pas rapide retourne faire du vélo... je tourne la tête et réponds : bonjour. Il me regarde et crie : j'ai pu faire du vélo!

Instantanément, je me suis dit voilà le lead de mon prochain texte en période de confinement. Cette brève et spontanée communication dura au plus trois secondes. Le garçon comme pour moi, ce fût la première fois que ce jeune voisin m'adressait la parole. Un flash de soixante ans... je pensais à ma défunte mère... qu'aurait été un confinement avec ses quatorze marmots?

Je connais de vue ce jeune garçon accompagné par sa mère et son petit frère sur le chemin de l'école. Bonjour à sa mère au plus. Le garçon a peut-être six, sept ou huit ans, je ne sais trop? Je me suis dit qu'avec son air enjoué sinon excité de jouer dehors en période de confinement sanitaire, j'ai eu l'impression que le garçon venait de découvrir les prémisses du sentiment de liberté. Liberté de mouvements sans doute mais son désir de le crier à un presqu'inconnu m'a plongé dans l'univers de l'insouciance infantile. Lors de ce petit événement de trois secondes, le soleil resplendissait, le vent très léger, les oies plein les battures, une vraie belle journée printanière et soudainement j'entends la joie s'exclamée spontanément, gratuitement sans rien en retour. En même temps je me disais, peut-être que le petit garçon avait besoin de s'exprimer. Je sentais le bonheur protégé par un casque de vélo.

Ces trois secondes sont devenues un souvenir installé quelque part dans mon cerveau. Une période de confinement est un encadrement social forcé, rien de naturel à cet état. Certes nous participons à ce confinement, à la fois décideurs et sujets... les options sont limitées. Cependant, nous avons du temps pour nous-mêmes avec une limitation de contacts physiques. Le rythme trépidant de notre société de consommation a connu une rupture sans précédent. Boulot, dodo, métro... toujours à dépenser de l'argent pour l'essentiel et parfois pour rien d'essentiel.

De nombreuses observations amènent des réflexions qui conduisent chacun d'entre nous à une introspection obligée. Que m'arrivera-t-il si la Covid-19 me rattrape? La crise économique? Je dépense moins mais plus en ligne? Les enfants sont agités? Y aura-t-il une pénurie alimentaire? Trouvera-t-on un vaccin efficace; 12 à 18 mois c'est pas demain? C'est un virus mortel? Tous mes codes sociaux sont chamboulés. Je n'ai pas embrassé mes parents âgés depuis deux mois? En même temps, j'ai du temps? Je savoure chaque heure du jour avec des yeux différents? J'ai lu un article intéressant qui montrait que de tous nos sens (l'odorat, la vue, l'ouïe, le toucher...), de tous nos sens, l'absence du toucher peut conduire à la mort? J'ai l'impression que mes prochains câlins vont prendre plus de sens? Je suis occupé pour les choses du quotidien, mais je pense comme jamais auparavant? Je suis angoissé, stressé? Dire qu'il y a encore des enfants qui meurent de faim dans le monde? Je me souviens d'un frère de mon père qui avait subi la grippe espagnole en 1919, il a survécu mais fragilisé? Comment notre société pourrait revenir comme avant? Je dois accepter que l'après pandémie me conduira à faire de nouveaux choix individuels et collectifs? J'espère que la solidarité sera notre lien commun.

Avoir du temps... trop c'est comme pas assez. Le plus difficile dans ce confinement, c'est le sens du toucher qui est altéré, amputé. Ne sommes-nous pas des êtres sociaux?

Le philosophe français, Éric Lenoir, écrit : Au lieu de passer quatre heures par jour à regarder les nouvelles anxiogènes de la télévision, lisez de la poésie, promenez-vous dans la nature, faites des choses qui vous amènent des émotions positives. » Frédéric Lenoir est sans équivoque : il faut selon lui prendre cette crise par les cornes et tenter d'y voir une occasion pour changer notre regard sur nos vies, de nous nourrir intérieurement, de nous enrichir l'âme, individuellement et collectivement.

L’anxiété permanente est nocive sur notre santé, croit l’intellectuel : « Pour avoir une bonne défense immunitaire, notre système émotionnel est décisif. On ne pourra pas sécréter de la dopamine, de la sérotonine ou de l’ocytocine dans un climat d’anxiété et de peur. »

(Source : https://ici.radio-canada.ca/premiere/emissions/plus-on-est-de-fous-plus-on-lit/segments/entrevue/).

Guy Laprise


PS : ami-e(s) lecteur-trice(s), vous avez le goût de partager votre expérience de confinement, faites parvenir un texte ou des photos au journal Le Hublot.




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